["IL N'EST DE VÉRITABLE MORT QUE DANS L'OUBLI" - Roland Dorgelès ]
Le Groupement de Gendarmerie des Pyrénées-Atlantiques souhaite consacrer chaque mois, un article sur « Les gendarmes du département qui nous ont quittés, que l'on n'oublie pas... » et dont les noms figurent sur nos casernes, nos salles, ou ceux qui sont partis sans que l'on puisse inscrire leur nom…
Ce devoir de mémoire permettra de partager avec vous le souvenir de ces hommes et de ces femmes engagés au quotidien pour votre sécurité, les anecdotes de leurs camarades, amis et de penser aussi à leur famille, aux retraités et actifs qui les ont connus.
Pour commencer ce feuilleton, nous rendons un hommage tout particulier au Lieutenant-Colonel Alexandre ABADIE.
Comme vous le savez tous,…ou presque tous,.. le Groupement de Gendarmerie situé cours Léon Bérard se nomme Caserne Lieutenant-Colonel ABADIE en mémoire d'Alexandre ABADIE (1903-1962), héros de la Résistance à Toulouse, où l'officier de gendarmerie exerçait durant la seconde Guerre Mondiale.
Alexandre ABADIE est né le 23 décembre 1903 à La Rochelle, Charente Maritime.
Engagé volontaire pour 4 ans au 132° régiment d'infanterie le 3 janvier1922, il est nommé au grade de sergent le 21 décembre 1922. Au terme de son engagement, le 3 janvier 1926, il se retire à La Rochelle. Le 22 septembre 1928, il se rengage, au titre de l'École Militaire Préparatoire de l'Infanterie de Rambouillet. Admis dans le corps des Sous-Officiers de carrière le 27 septembre 1929, il intègre l'École militaire de l'Infanterie le 1er octobre 1929 et est nommé sous-lieutenant un an plus tard, le 1er octobre 1930. Affecté au 15° régiment d'infanterie le 1°octobre 1931, il est nommé lieutenant le 1°octobre 1932. Il épouse Agnès ANDRIEU la même année et est père de cinq enfants, dont 2 adoptés (neveu et nièce orphelins).
Alexandre ABADIE rejoint la gendarmerie le 1er octobre 1934 avec son admission à l'École d'Application de la Gendarmerie de Versailles. Affecté à la 8° légion de Garde Républicaine Mobile, puis à la 17ème légion de gendarmerie en qualité d'adjoint au trésorier, il est promu au grade de capitaine le 1er septembre 1939.
Décrit comme un paisible père de famille, un gendarme discret et un officier modeste, les hauts faits du Lieutenant-Colonel Alexandre ABADIE font de lui un authentique héros de la Résistance.
Le colonel Paul PAILLOLE, haut personnage de la Résistance, évoque le Lieutenant-Colonel Alexandre ABADIE en ces termes: « Ce qu'il y a d'exceptionnel dans l'existence du Lieutenant-Colonel Alexandre ABADIE, c'est la spontanéité et le désintéressement de son engagement au service de la France, engagement total dans les épreuves imposées à notre pays, par l'occupation ».
Le 1er février 1941, il est muté en qualité de trésorier à la 17° légion de gendarmerie à TOULOUSE. Dès son arrivée, il décide de mettre tous les moyens que lui donneront ses fonctions au service de la Résistance. Il donne à ses subordonnés la consigne de faciliter le travail des résistants.
Admis au sein des réseaux des Forces Françaises Combattantes, il remplit de nombreuses missions.
Il s'engage directement en communiquant régulièrement à la Résistance des renseignements recueillis par la gendarmerie sur les menées des commissions allemandes de l'armistice et des groupes collaborationnistes.
Après l'invasion de la zone Sud, il fera parvenir aux « combattants de l'ombre » tout ce qu'il peut apprendre sur les services de renseignements allemands et sur la Gestapo. Il apporte son concours aux réseaux de la Résistance en acheminant du courrier, en facilitant le camouflage de matériel et en hébergeant des agents menacés d'arrestation. Il organise la mise en place et la protection de passages clandestins au travers des Pyrénées.
Du 10 octobre 1942 au 19 août 1944, Alexandre ABADIE se distingue tout particulièrement par son appartenance aux Forces Françaises Combattantes, en qualité d'agent P1 et de membre du Groupe « Morhange ». Ce réseau de résistance toulousain effectue des actions directes et de contre-espionnage contre l'envahisseur allemand et les collaborateurs du gouvernement de Vichy.
Le 2 janvier 1944, il contribue à la réussite d'une embuscade d'un commando du réseau « Morhange » visant le chef de la Gestapo de TOULOUSE, en prêtant des uniformes de gendarmes. Les archives de la police allemande découvertes à cette occasion permettent d'éliminer la plupart des collaborateurs de la région toulousaine.
Du 31 mars au 15 avril 1944, il permet l'évasion de l'épouse du général de Lattre de Tassigny et de son fils Bernard, recherchés par les allemands. Il les accueille et les cache dans son logement de la caserne Saint-Michel à TOULOUSE. Les faisant passer pour son épouse et son fils, il les accompagne en train jusqu'à PERPIGNAN, d'où ils peuvent fuir vers l'Espagne.
Le 1er octobre 1944, le capitaine ABADIE prend le commandement de la compagnie de gendarmerie de la Haute-Garonne.
Promu au grade de chef d'escadron le 25 décembre 1944, il est affecté le 10 décembre 1947 au commandement de la compagnie de gendarmerie des Basses-Pyrénées (actuel groupement des Pyrénées-Atlantiques).
Il sert ensuite à l'état-major de la 5ème légion de gendarmerie de mai 1949 à juillet 1957.
Volontaire pour servir en Algérie malgré le fait qu'il soit touché par la limite d'âge et qu'il aurait pu se retirer auprès de sa famille dans sa maison de BIZANOS, il embarque pour l'Afrique du Nord le 31 juillet 1957.
Promu Lieutenant-Colonel de réserve le 1° novembre 1958, il est rayé des contrôles et des cadres le 23 décembre 1958 et se retire à BIZANOS (Basses-Pyrénées) début 1959. Il décède le 18 septembre 1962 à BIZANOS, à l'âge de 59 ans.
Son épouse Agnès, également engagée dans la résistance, est citée en janvier 1947 de la croix de guerre avec Étoile d'Argent, pour ses actions courageuses et son dévouement face à l'occupant. Elle s'éteint en 1995.
Aujourd'hui, il reste trois de leurs enfants, une fille et deux garçons dont un ancien Lieutenant-Colonel de l'armée et Jean-Pierre, ami fidèle de l'Institution, pâtissier en retraite.
Un square porte également son nom dans la Ville Rose …..
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